Itinéraire d’une archéologie industrielle : Groupe scolaire Lili Boulanger à Saint Denis

Rencontre avec Davide Persanti, architecte, chef de projet.

 

« C’est mon 1er projet en tant que chef de projet. J’y tiens particulièrement », confie Davide.  

Le site est une ancienne usine de peinture automobile qui utilisait des solvants très puissants stockés dans des cuves en béton creusées dans le sol. Avec le temps, le béton s’est fissuré entrainant des fuites importantes de produits toxiques qui vont jusqu’à infiltrer la nappe. Et le bâtiment destiné à être déposé se révèle amianté.
Ces découvertes, faites post-concours, prennent les équipes de court. Les équipes de la mairie de Saint-Denis changent : la nouvelle maîtrise d’ouvrage renforce le budget pour procéder à la dépollution complète du site et demande à l’agence d’ajouter des salles de classes sans que le volume du bâti n’augmente.

archi5 tient à préserver la mémoire industrielle du lieu en conservant une partie de la façade du bâtiment vouée à disparaître. « La façade existante est devenue notre matrice », souligne Davide. L’architecture est voulue formelle. Pour ce projet, l’équipe crée une règle mathématique. Elle décide d’une trame entre poteaux, qui redivisée, donne la trame des châssis, qui elle-même redivisée donne la trame des joints debouts de la couverture. L’extérieur et l’intérieur sont ainsi retramés.

« Donner des règles claires et rigides permet aux équipes du chantier de vérifier seules la bonne exécution de leurs travaux. Elles ne peuvent pas se tromper. Mon obsession pour la trame dans ce projet se répercute jusqu’aux façades en bois. », s’amuse Davide.

Photographie Victor Panlou

« Je crois que cet effort géométrique lié au passé mécanique du lieu se sent quand on est à l’intérieur du bâtiment mais a perdu de la dureté qui n’était pas propre aux enfants », poursuit-il. 

Le programme est rédigé en 2016. « En moins de 10 ans, l’attitude des maîtrises d’ouvrage par rapport à la sensibilité environnementale a beaucoup changé. On parlait alors moins de bâtiments écologiques mais la ville de Saint-Denis a été à l’écoute dès la phase concours ».

Le bâtiment, très performant d’un point de vue énergétique est avant-gardiste pour son « époque » : presque tout le bâtiment est en bois (les cages d’escalier sont en béton pour des raisons réglementaires), les faux-plafonds sont en fibres de bois, les isolants de l’extérieur en fibres végétales… 

« Ces exigences font partie intégrante du projet présenté par l’agence mais le programme nous a aidés », confie le chef de projet.

L’aspect paysager a toute son importance au sein du nouveau groupe scolaire. Le projet comprend des toitures végétalisées pour favoriser la biodiversité, une cour oasis pour préserver la fraîcheur du lieu, une serre et un jardin pédagogique pour que les enfants puissent découvrir les cycles de la nature. Des petits récupérateurs d’eau et panneaux photovoltaïques sont installés pour expliquer aux enfants le fonctionnement de ce bâtiment écologique.  

 « C’est un projet que je sentais bien depuis le début et qui s’est fait un peu tout seul. Un projet simple, équilibré, où tout fonctionne », conclut Davide. 

Davide Persanti, chef de projet 

Davide suit ses études d’architecture à l’Università degli Studi Roma Tre où il obtient son diplôme avec la mention « Cum Laude ». Il construit son parcours à Rome. Son intérêt pour l’histoire l’amène à travailler sur des sites archéologiques étonnants en Italie, en Syrie et en Irak. Il participe ainsi à la réhabilitation et l’extension du musée national de Damas, ou encore à la muséalisation des tombes royales d’Ur destinées à devenir musée à ciel ouvert. En 2014, il obtient à Paris la prestigieuse bourse Cornelius Hertling – Leonardo da Vinci et rejoint archi5. Fidèle à l’héritage d’un lieu, David aborde le Groupe Scolaire Lili Boulanger telle « une archéologie industrielle ».